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  • Publié le 22 juillet 2022

Vulnérables

L’Institut catholique de Paris et le Centre Sèvres lanceront à la rentrée un diplôme universitaire pour former les personnes engagées dans le soin à faire face aux situations complexes sur le plan éthique a rapporté cette semaine le quotidien La Croix. Des personnels qui proviendront sans doute en majorité des services de gynécologie-obstétrique et des soins palliatifs, deux spécialités, deux échéances du début et de la fin de vie où l’Église catholique mène le combat bioéthique pour le respect de la vie humaine dans sa dimension divine de la Création. Deux moments où les hommes et les femmes, enfants, adultes ou vieillards sont dans un état fragile, c’est à dire de faible constitution, attaquables, vulnérables. Le Larousse précise à propos du terme vulnérable : « qui est exposé aux atteintes d’une maladie, qui peut servir de cible facile aux attaques d’un ennemi (une position vulnérable) ; qui, par ses insuffisances, ses imperfections, peut donner prise à des attaques (une argumentation vulnérable) ». A contrario, invulnérable inclut une dimension morale. Et dans ce registre, la vulnérabilité peut avoir des conséquences très variables en termes d’intégrité, d’indépendance, de santé, de dignité. C’est l’enjeu des débats sur l’avortement et sur la fin de vie. Des questions complexes car elle touchent au statut de la Vie et en corolaire aux droits attachés à la naissance, la vieillesse, des modalités de vie, toutes traversées par cette vulnérabilité (individuelle et sociétale) de l’insuffisance, de l’incomplétude, du manque. Car la vulnérabilité, (qui concerne également la situation de handicap) c’est aussi « Reconnaître l’humain jusque dans les extrêmes limites de son être et de sa vie, réaliser une solidarité efficace avec ces limites, précisément, tel est le projet politique que la communauté internationale n’a jamais été capable d’énoncer dans ces termes » [1] avait écrit en 2003, la philologue, psychanalyste Julia Kristeva. Ce combat essentiellement occidental a été subitement déçu aux États-Unis, fin juin. Mais l’espoir renait en Europe. Le Parlement européen a adopté, jeudi 7 juillet, une résolution visant à inclure l’avortement dans la Charte des droits fondamentaux de l’UE et à condamner l’arrêt de la Cour suprême des États-Unis révoquant le droit fédéral à l’avortement, cette décision guidée par des motifs religieux, par les églises chrétiennes et la communauté conservatrice américaine.
En France, nous avons vécu deux débats législatifs de haute qualité sur les enjeux éthiques du début et de la fin de vie. En 2019, le droit de l’embryon et les différents modes de procréation ont abouti à la loi Bioéthique. En revanche, en 2021, un énième débat houleux sur une proposition de loi sur le droit à mourir dans la dignité n’a pas permis de sortir des questions que posent les traditions religieuses et qui reposent sur une critique de la manière avec laquelle la société moderne aborde le sens de la mort.
Pouvoir envisager sereinement la vie comme un don et avoir la liberté-volonté de faire ce geste ou de le retenir pour des raisons toujours endogènes à celui qui l’accomplit, pouvoir envisager la fin de vie dans l’idée du droit à mourir thérapeutique ou volontaire en fin de vie, cela ne tient pas au seul respect de la vie humaine, mais aussi à l’humain en tant qu’être : un être autonome, fragile comme l’est chacun de nous depuis sa naissance mais pas vulnérable à autrui et par autrui.
Réfléchir sur des conditions, des valeurs, des finalités, sur l’ensemble des conceptions morales qui dictent ses actes à quelqu’un est du domaine de l’éthique. L’éthique ne relève pas à priori de la spiritualité et d’une conception morale tirée du respect de valeurs religieuses mais avant tout d’une éthique de l’être humain, du genre humain, d’une métaphysique de l’Autre en tant qu’autre, y compris dans le soin.
On ne peut conclure ce propos sans avoir de pensées pour toutes les personnes humaines prises dans des conflits qui les rendent vulnérables, qui sont niées en tant qu’êtres humains, en tant qu’autre, comme c’est notamment le cas et le fait du pouvoir russe actuel, à deux pas de chez nous, en Ukraine.

[1Julia Kristeva, Lettre au président de la République. Fayard, 2003. p.33

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