«On ne fait pas d’élection avec des prières »Proverbe québécois

 

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  • Publié le 6 février 2022
  • Mise à jour: 11 février 2022

Première réunion du FORIF, la nouvelle assemblée de dialogue pour structurer l’islam en France est lancée !

Quelque quatre-vingts acteurs du culte musulman venus de nombreux départements se sont réunis à Paris, ce samedi 5 février, pour la première réunion plénière du Forum de l’islam de France (FORIF), épaulés par des représentants du bureau central des cultes du ministère de l’intérieur. Gérald Darmanin, présent tout au long de l’après-midi, a vu dans cet événement la naissance d’une nouvelle « instance de dialogue nationale » des représentants de la seconde religion de France avec l’État. Il est d’ores et déjà prévu qu’elle se réunisse une fois par an. Toutefois le forum n’a pas vocation à être une structure permanente, mais plutôt un cadre destiné à discuter et régler avec les pouvoirs publics des difficultés concrètes auxquelles se heurtent les acteurs du culte musulmans aujourd’hui. « Désormais, il n’y aura plus pour le gouvernement de représentant unique du culte musulman » mais « des collectifs organisés par thématiques pour obtenir des résultats concrets », a résumé le ministre de l’intérieur lors de son discours de conclusion.

« Organisez-vous  ! » 

« Organisez-vous  ! ». C’est par cette invitation, mi-injonction mi-prière, que le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin a enjoint ce samedi ses interlocuteurs musulmans du FORIF à écrire une « nouvelle page » dans l’organisation de leur culte tout en leur promettant de les aider à créer un « statut » et une « protection sociale » pour les imams et les aumôniers, comme cela a été demandé lors de la restitution des travaux des groupes de travail. « Ce dialogue renouvelé avec l’État reposera désormais sur des femmes et des hommes qui tirent leur légitimité de leur travail et de leur logique de terrain », a-t-il ajouté, plaidant pour « une nouvelle forme de dialogue plus ouvert, plus divers, plus représentatif de la diversité de l’islam de France ».
Comme en 2003, cette nouvelle naissance doit beaucoup à l’État. Le panel des participants a été composé par le ministère de l’intérieur qui a demandé à chaque préfet de lui faire remonter les noms de deux ou trois personnes, remarquées pour leurs compétences et leur capacité à avancer des propositions lors des trois assises territoriales menées ces dernières années. Au final, le ministère de l’intérieur en a retenu une soixantaine, auxquels il a adjoint une quarantaine de personnalités « qualifiées ». Mais à la différence de 2003, les pouvoirs publics ne parlent pas, cette fois, de donner au culte musulman un organisme de représentation unique. Ils considèrent que le CFCM a, au terme de vingt ans d’existence, fait la démonstration que la conception dont il procédait, fondée sur le rôle des fédérations de mosquées, était une impasse face à la diversité musulmane et à ses nombreux antagonismes.

Tourner la page du CFCM

Exit donc les luttes entre fédérations liées à des pays étrangers et place à des acteurs de terrain compétents dans leur domaine et décidés à être « constructifs ». C’est ainsi que l’on pourrait résumer les intentions de l’exécutif. L’objectif de ce premier Forum de l’islam de France (FORIF), mis sur les rails par Emmanuel Macron et son ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin pour mettre fin au Conseil français du culte musulman (CFCM) et organiser sa succession. Son président, Mohammed Moussaoui, le réunira une dernière fois le 19 février pour le dissoudre. Soumis à d’importants conflits de personnes et d’intérêts ainsi qu’à d’importantes divergences d’ordre théologique sur arrière-plan d’influences étrangères, le CFCM « ne rendait plus service aux musulmans », indique le ministère.
Le maigre bilan du CFCM a ainsi conduit les pouvoirs publics à choisir un nouveau modèle, inspiré du « Deutsche Islam Konferenz », qui, en Allemagne, joue le rôle d’une institution de régulation du dialogue plutôt que celui d’une structure institutionnelle dirigeante. Aujourd’hui, pour le gouvernement, l’islam en France doit se construire depuis la base, à l’échelon départemental, et en phase avec les principes de la République inscrits dans la loi du 24 août 2021.

Formation des imams, accompagnement des aumôneries,...

Bien en amont de cette réunion, des groupes de travail avaient été constitués pour examiner les sujets récurrents de l’organisation de l’islam en France. Ont ainsi été discuté : le rôle et la formation des imams, ses liens avec les associations cultuelles, l’accompagnement des aumôneries, la protection des lieux de culte contre les actes anti-musulmans ou encore l’application de la loi contre le séparatisme. Lors de la réunion les participants ont présenté au ministre les premières propositions auxquelles ils sont parvenus. Les quatre groupes de travail consacrés aux aumôneries, au statut et à la formation des imams, à l’application de la loi confortant le respect des principes de la République (CPRP) et à la lutte contre les actes anti-musulmans ont ainsi présenté les premiers résultats auxquels ils sont parvenus. Il a été ainsi évoqué l’idée de calquer l’organisation de l’aumônerie musulmane sur celle des protestants afin de résoudre la question de formation et du statut des aumôniers au seins des prisons, des hôpitaux et de l’armée. De même pour les imams, la création d’un contrat et d’une fiche de poste ainsi que d’une formation unique, l’appel à la création d’un collectif dans chaque département ont ainsi esquissé les contours d’un statut des imams qui serait notamment en charge de résoudre d’ici fin 2024 les problèmes soulevés par la fin programmée des imams détachés. Une échéance que le ministre de l’intérieur a jugée tenable. Le troisième groupe a pour sa part annoncé la création d’un guide pour l’application de la loi « confortant le respect des principes de la République ». Un prototype devant encore être enrichi de cas pratiques a été remis en séance au ministre de l’Intérieur. Par ailleurs le passage en régime loi 1905 des associations gérant les mosquées ( 90 % sont constituée en loi 1901) a donné lieu à de nombreuses doléances : la majorité des associations actuelles, de tailles réduites, n’ont pas les moyens pour financer ce changement de régime et son fonctionnement, notamment pour faire appel à un expert-comptable comme l’impose la loi. Par ailleurs l’accessibilité aux banques posent des problème à nombre d’entre-elles ont souligné les rapporteurs. Le ministre leur a assuré se saisir de ce problème tout en saluant « le signal positif » donné par la Grande Mosquée de Paris qui a décidé vendredi de son passage en loi 1905, un régime qui donne droit à des exonérations comme la taxe foncière. Enfin, le quatrième groupe, participant de cette problématique de la gestion des lieux de cultes mais sous l’aspect de leur sécurité et de la lutte contre les actes anti-musulmans, a proposé la création d’une association nationale de gestion des lieux de culte musulmans, une organisation qui serait appuyée sur des instances départementales et un référent local en lien avec les préfets et le parquet. Le ministre s’est félicité de cette dernière proposition la qualifiant de « bonne idée » assurant qu’ « Il n’existe nul motif pour penser que l’islam ne puisse pas trouver sa place, comme toutes les autres religions, au sein de la République française » et que « Oui, l’islam est une religion française, une religion comme les autres. Elle n’est ni la préférée de l’État, ni la moins aimée ».

La question du financement laissée en suspens

Évacuée des travaux préparatoires parce qu’elle suscite immédiatement tensions et conflits d’intérêts, la question des (sources de) financements n’a pas été directement abordée lors de cette première séance. Pourtant aujourd’hui, les circuits de financements manquent souvent de transparence, que ce soit au sein des mosquées, des agences de voyages qui organisent le pèlerinage ou dans le circuit du halal. Ils sont en outre insuffisants pour financer la formation du personnel cultuel (imams et aumôniers) et leur rémunération. D’où, d’ailleurs, la présence depuis des années de trois cents « imams détachés », salariés par la Turquie, l’Algérie et le Maroc et envoyés par ces États dans les mosquées françaises, ce qui allège d’autant les charges de ces lieux de prières qui ne pourraient fonctionner sans.
Aussi est apparue l’idée d’un cinquième groupe de travail consacré à cette question financière. L’essayiste Hakim El Karoui y a présenté son projet d’Association musulmane pour l’islam de France (AMIF), qu’il propose depuis trois ans. L’AMIF serait une entreprise de certification des agences de voyage impliquées dans le pèlerinage et dont l’ambition, à terme, serait de pouvoir financer des projets. Un accord entre la France et l’Arabie saoudite serait en cours de négociation concernant la gestion des 25 000 visas délivrés pour le hajj. Gérald Darmanin a reconnu l’existence de l’initiative. Nul doute que la future organisation du culte musulman voulue par le gouvernement, dans les délais que lui imposent désormais la loi du 24 août 2021 et l’échéance de 2024 pour la fin des imams détachés, devra reposer sur un financement propre, indépendant de l’étranger. Il en ira de son succès comme des réalisations concrètes des propositions du FORIF. Mais comme l’a déclaré Gérald Darmanin en conclusion de son discours : « parce que nous avons avons fait le choix de travailler avec des Français de bonne volonté, soucieux d’oeuvrer pour leur culte et dans la République, nous réussirons. »

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