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- Publié le 8 décembre 2017
- Mise à jour: 5 septembre 2025
À Bondues, la Métropole lilloise renoue avec la tradition du béguinage pour loger les seniors.

Apparu en Belgique et dans le nord de la France au XIIe siècle pour loger des femmes seules, pieuses et contemplatives, le béguinage, après une lente disparition, renait aujourd’hui comme l’archétype moderne de l’habitat social et communautaire. Le 10 novembre dernier, la Métropole Européenne de Lille, la ville de Bondues, et la société HLM Notre Logis, inauguraient ainsi le Béguinage du coq, un nouveau programme de logements sociaux destiné au séniors. Petit détour par cette résurgence du passé et du sacré, portée par un esprit fraternel et solidaire...
Apparus en 1173 à Liège, puis dans le nord de la France, les béguinages connaissent véritablement leur essor à partir de 1227 sous l’impulsion d’Élisabeth de Hongrie qui décide de soulager la misère des femmes seules en s’appuyant sur les hôpitaux de l’époque. Sa canonisation le 4 juin 1235 par la bulle Gloriosus in majestate, crée une émulation dans le milieu des femmes de bonnes familles, désireuses de mener une vie pieuse et contemplative, sans pour autant prononcer de vœux définitifs.
Dès lors, rompant peu à peu avec ce lien hospitalier, les béguinages deviennent des communautés indépendantes de femmes qui se regroupent et s’organisent spontanément souvent à côté d’un lieu saint. Ils se multiplient au Brabant, en l’Allemagne et en Europe du Nord.
Mais ces femmes, non mariées, libres du clergé, économiquement actives et prônant une vie chaste ainsi que l’idéal de pauvreté, ne tardent pas à attirer l’attention puis la méfiance de la papauté. Beaucoup sont poursuivies, condamnées pour hérésie et tuées. Ce fût notamment le cas de Marguerite Porete, née en 1250 à Valencienne dans le comté du Hainaut, auteure du Miroir des âmes simples et anéanties qui seulement demeurent en vouloir et en désir d’amour. Dans cet ouvrage rédigé en français elle prône l’anéantissement de l’âme ; l’homme doit vider son âme pour laisser une place libre à Dieu, laisser son esprit libre et vacant pour recevoir Dieu. Cette vision qui donne une forme de supériorité d’action de l’homme sur Dieu lui vaut d’être condamnée en hérésie et d’être brûlée avec son livre, en place de Grève à Paris, le 1er juin 1310. Sa doctrine ainsi que celle, assez proche, de la secte du Libre-Esprit, seront au cœur des discussions du Concile de Vienne de 1311-1312 qui condamnera les perfections des béguines et fera disparaître définitivement ces mouvements.
Si le « béguinisme » disparait totalement en tant que doctrine spirituelle, il perdurera comme organisation sociale communautaire et survivra aux guerres de religion, à la révolution française, aux différentes réformes, aux conflits mondiaux du XXe siècle. Après la seconde guerre mondiale, il ne reste que douze béguinages encore actifs en Flandre et deux aux Pays-Bas ; la toute dernière béguine est décédée en avril 2013, à l’âge de 92 ans. Le célèbre béguinage de Bruges qui abrite aujourd’hui le monastère bénédictin de la Vigne compte parmi les treize cités béguinales flamandes, aujourd’hui inscrites au patrimoine mondial de l’Unesco.
Du logis communautaire au vivre chez soi et en convivialité
Au moyen-âge, le béguinage était une petite cité, un ilot de quiétude et de partage coupé du reste de la ville par un haut mur d’enceinte ou par des douves comme celui de Bruges construit en 1275. Il protégeait ainsi physiquement des béguines aux situations sociales très diverses : certaines étaient propriétaires, d’autres locataires et d’autres encore, dépourvues de revenus propres, se trouvaient comme les novices, hébergées dans des maisons communes, les convents.
Les béguinages médiévaux n’ont plus aujourd’hui leur raison d’être et les femmes seules n’ont plus besoin de grilles pour se protéger Bien au contraire, tous les auteurs de projets d’habitats groupés, de services partagés, de villages communautaires, de béguinages font ce constat : l’éclatement des structures familiales, l’érosion de la foi, la disparition de l’amitié de proximité, de la vie de village ou de quartier, façonnent, spécialement pour les personnes âgées, une société de solitude et de souffrance. Le Béguinage du coq de Bondues vient répondre à ces attentes et à celles de la Métropole Européenne de Lille dont 35 % de la clientèle sociale a aujourd’hui plus de 65 ans et habite souvent des logements inadaptés.
Un ilot de tranquillité
Dans ce programme d’habitat social à taille humaine les 26 maisons disposent toutes d’une chambre au rez-de-chaussée, de volets roulants électriques, de douches à l’italienne, de barres de maintien et de passages de portes plus larges. Si l’habitat communautaire a été remplacé par des logements individuels de plain-pied, les pelouses, la place, les coursives et les parties communes intérieures ou extérieures qui les relient en assure la fonction communautaire.
Le réemploi de l’organisation en ilot des béguinages médiévaux n’est pas le hasard d’une contrainte foncière mais bien une « volonté » comme l’affirme Monsieur Delannay, directeur général de Notre-Logis : « Nous avons créé une place centrale sur le modèle des béguinages. Nous y avons planté 2000 jonquilles pour qu’elle ressemble au célèbre béguinage de Bruges en Belgique. Elle a été nommée La place du banc des amis. Nous envisageons prochainement d’y introduire des animaux ainsi que d’y installer un boulodrome afin de faire de ce site un lieu de rencontre ouvert sur le quartier et où il fait bon vivre ensemble ».
Retour aux origines chrétienne ?
Après les opérations de Marcq-en-Baroeul et d’Halluin, celle de Bondues est la première à réutiliser le terme de béguinage et l’origine chrétienne du concept. « C’est un béguinage largement inspiré de celui de Bruges qui est une référence dans notre imaginaire collectif régional. Nous pouvons y voir un clin d’œil à cette œuvre architecturale flamande. » commente sobrement Monsieur Delannay pour qui il apparaît certain que dans les années qui viennent, les programmes sociaux basés sur le modèle du béguinage pourraient se multiplier.
En effet, qu’ils soient mus par une nécessité sociale ou le fruit d’une préoccupation fraternelle, solidaire voire également pour certains d’un désir de vivre ensemble une foi chrétienne, les béguinages sont conçus pour permettre aux femmes et aux hommes de vivre dignement leur fin de vie, d’en être les acteurs jusqu’au bout.

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